Encore appelé bail 3/6/9, le bail commercial est un contrat réputé pour la stabilité. Pour le preneur, c’est l’élément essentiel de son fonds de commerce, raison pour laquelle la loi le fait bénéficier d’une protection spéciale. Pour le bailleur, c’est une source de revenus durable et le fruit de ses investissements. Un bail commercial engage ainsi le bailleur pour une durée de 9 ans minimum, tandis que le preneur dispose, lui, de la faculté de résilier le contrat une fois tous les trois ans.
En pratique, il existe une multiplicité de situations pouvant conduire à la résiliation du bail commercial avant l’arrivée du terme dont il convient de maitriser les spécificités. Maître Nikolay Polintchev explique les principaux cas de résiliation anticipée du bail commercial, que ce soit à l’initiative du bailleur ou du locataire.
La résiliation du bail commercial avant son terme par le bailleur
En principe, le bailleur ne dispose pas du droit de résilier un bail commercial avant la neuvième année du contrat. Et même dans cette hypothèse, la reprise du local par le bailleur ne peut intervenir sans une indemnisation versée au locataire en contrepartie de la perte par celui-ci de son droit au bail, sous forme d’indemnité d’éviction. Néanmoins, la loi permet au bailleur de procéder à la résiliation du bail dans certains cas précis.
La clause résolutoire
L’hypothèse la plus classique permettant au bailleur de résilier le contrat avant son terme, est celle portant sur l’application d’une clause résolutoire. En effet, le bail commercial peut comporter, et c’est quasi systématiquement le cas, une clause résolutoire stipulant que le contrat sera automatiquement résilier en cas de manquement du preneur à ses obligations légales ou contractuelles. Pour être valable, la clause doit viser expressément les infractions qui seront sanctionnées par la résiliation. La clause ne produit effet qu’un mois après l’envoi d’une mise en demeure portant commandement de payer ou sommation d’exécution demeurée infructueuse. La mise en demeure doit être faite par acte d’huissier et mentionner expressément le délai sous peine de nullité. Si le preneur ne se libère pas dans le délai d’un mois, la résiliation est acquise de plein droit et doit être seulement constatée par le tribunal judiciaire, le juge n’ayant aucun pouvoir d’appréciation de la gravité du manquement contractuel fondant la mise en œuvre de la clause résolutoire. Tant que la résiliation n’est pas constatée par une décision ayant acquis l’autorité de la chose jugée, le locataire a la possibilité de saisir le juge qui peut accorder des délais de grâce dans la limite de deux ans et suspendre les effets de la clause (C.com., art. L. 145-41, al. 2).
La faute du locataire
Indépendamment du jeu de la clause résolutoire, le bailleur peut se prévaloir d’une faute commise par le locataire pendant l’exécution du bail, pour obtenir son éviction du local commercial qu’il lui loue. En effet, en cas de manquement du locataire à l’une des obligations mis à sa charge dans le bail, le bailleur peut demander la résiliation en justice devant le tribunal judiciaire du lieu de situation de l’immeuble, sans qu’une mise en demeure préalable soit nécessaire. La résiliation peut être demandée pour toute infraction aux règles du bail. Le juge dispose d’un pouvoir d’appréciation et ne prononce la résiliation que si le manquement présente une certaine gravité qu’il apprécie souverainement (Civ. 3e, 7 févr. 2019, n° 17-13.443). En pratique, le bailleur peut évoquer le défaut de paiement du loyer, la violation du règlement de copropriété ou l’exercice d’une activité non autorisée. De même, le bailleur peut aussi se fonder sur le fait que le locataire n’a pas souscrit une assurance habitation pour résilier son contrat.
L’exercice du droit de reprise anticipée
Le bailleur dispose de l faculté de résiliation triennale en respectant les formes et le délai du congé de l’article L. 145-9 du code de commerce. Ce droit est conditionnel puisque la résiliation doit être demandée afin de permettre au bailleur de construire, de reconstruire, de surélever l’immeuble existant, d’exécuter des travaux prescrits ou autorisés dans le cadre d’une opération de restauration immobilière, de réaffecter le local d’habitation accessoire à cet usage, de transformer à usage principal d’habitation un immeuble existant par reconstruction, rénovation ou réhabilitation ou en cas de démolition dans le cadre d’un projet de renouvellement urbain. Dans ces hypothèses, le locataire peut prétendre à une indemnité d’éviction. De plus, le propriétaire qui souhaite exercer son droit de reprise anticipée est obligé de donner un congé à son preneur par acte d’huissier ou via une lettre recommandée. Le délai de préavis exigé par la loi est de 6 mois au minimum.
La résiliation du bail commercial avant son terme par le locataire
La réglementation en matière de bail commerciale visant à instaurer une protection renforcée au bénéfice du preneur afin de favoriser la stabilité de son installation et le développement de son commerce, elle prévoit dans le même temps une faculté discrétionnaire laissé à celui-ci pour résilier le bail tous les trois ans, de même qu’une possibilité de résiliation à tout moment en cas de départ à la retraite du locataire.
La résiliation triennale
Contrairement au bailleur qui peut résilier le bail dans des cas limitativement prévus par la loi, le preneur a la faculté de le résilier discrétionnairement l’expiration de chaque période triennale (tous les 3, 6 et 9 ans). La validité de la résiliation est soumise à la notification d’un congés et au respect d’un préavis de six mois, délivré soit par lettre recommandée avec avis de réception soit par acte extrajudiciaire. Cependant, les baux conclus pour une durée supérieure à neuf ans, les baux des locaux monovalents, les baux des locaux à usage exclusif de bureaux et ceux des locaux de stockage (CGI, art. 231 ter, III, 3) peuvent toutefois comporter des stipulations contraires.
Le départ à la retraite du locataire
Si le locataire prévoit de prendre sa retraite, la loi l’autorise à résilier le bail commercial à tout moment, et ce, sans aucune indemnité. Il s’agit de la résiliation pour départ à la retraite prévue par les dispositions du Code du commerce. Le preneur doit néanmoins prouver qu’il a demandé à bénéficier de ses droits à la retraite ou qu’il est admis à une pension d’invalidité. Attention toutefois en cas de stipulations contraires dans le bail.
Perte de la chose louée
Le bail est résilié de plein droit en cas de perte totale de la chose louée par cas fortuit (C. civ., art. 1722). C’est l’hypothèse de la résiliation de plein droit du bail en raison de la survenance d’un évènement fortuit, tel un incendie rendant inexploitable le fonds du commerce et le local. Le preneur au bail perd alors le bénéfice de l’offre d’indemnité d’occupation (Civ. 3e, 29 juin 2011, n° 10-19.975, D. 2011. 1899, obs. Y. Rouquet ; D. 2012. 1844, obs. M.-P. Dumont-Lefrand ; RTD com. 2011. 728, obs. F. Kendérian).
La résolution amiable du bail commercial toujours possible en cas d’accord entre le bailleur et le preneur
Comme tout contrat, le bail commercial peut lui aussi faire l’objet d’une résiliation amiable, à tout moment et indépendamment des clauses stipulées, dès lors qu’un accord en ce sens est trouvé entre le bailleur et le preneur. Même si aucun formalisme juridique n’est exigé, il est fortement recommandé d’établir un écrit (acte bilatéral) afin de fixer les conditions et les conséquences de la résiliation du bail. Il est fréquent qu’en cas de discussions sur la résiliation amiable du bail, il soit demandé à la partie à l’initiative de la rupture de payer une indemnité à son cocontractant en fonction notamment du temps restant à courir jusqu’au terme du bail.
Résiliation en cas de procédure collective du preneur
Résiliation par l’administrateur judiciaire
Lorsque le preneur connait des difficultés économiques et qu’il est l’objet d’une procédure collective (redressement ou liquidation judiciaire), cette situation n’entraîne pas de plein droit la résiliation du bail commercial en cours (C. com., art. L. 145-45). Néanmoins, dans ces hypothèses, la résiliation du bail peut être prononcée par le juge-commissaire à la demande de l’administrateur judiciaire si elle est nécessaire à la sauvegarde du débiteur (C. com., art. L. 622-13, IV). Elle peut être demandée également par le liquidateur s’il ne dispose pas des fonds nécessaires pour payer les loyers après le jugement de liquidation (C. com., art. L. 641-12).
Résiliation par le bailleur
Pendant la période de sauvegarde et de redressement judiciaire, le bailleur ne peut demander la résiliation pour défaut de paiement des loyers antérieurs au jugement d’ouverture. Néanmoins, il peut la demander pour défaut de paiement des loyers postérieurs à ce jugement ou pour tout autre manquement du débiteur. Il ne peut agir qu’à l’expiration d’un délai de trois mois à compter du jugement d’ouverture (C. com., art. L. 622-14, al. 3, et L. 631-14-1).
Il peut aussi bénéficier de la clause résolutoire si elle était acquise avant le jugement d’ouverture.
Résiliation de bail commercial : le rôle de l’avocat en droit immobilier
Que vous soyez bailleur ou preneur, vous avez tout intérêt à être particulièrement vigilent en cas de résiliation de celui-ci, qu’elle soit à votre seule initiative ou qu’elle résulte d’une volonté commune de rompre le contrat. La multiplicité et la technicité des règles juridiques applicables en la matières et l’importance des enjeux encouru tant pour le bailleur que pour le preneur, le premier pouvant être tenu au paiement d’une indemnité d’éviction, le second au paiement de loyer jusqu’au terme triennal et à des travaux de remise en état du local, conduisent à conseiller de ne pas entreprendre de démarche amiable ou unilatérale en la matière sans avoir, au préalable, consulter un avocat en droit immobilier. Ce professionnel conseille et assiste, en effet, les parties pour qu’elles puissent décider en connaissance de cause les modalités et le moment de la résiliation du bail. L’avocat en droit immobilier assiste les parties pour la rédaction d’un protocole de résiliation amiable du bail en cas d’accord, il les conseils sur les formes et les motifs du congé à délivrer en cas d’initiative unilatérale et enfin, ils les représentent devant les juridictions pour défendre leur droits et intérêts.
Le cabinet de Me Nikolay POLINTCHEV peut ainsi vous assister :
– devant le juge des référés du tribunal judiciaire en cas de demande visant à constater la résiliation du bail commercial par l’effet de la clause résolutoire.
– devant le tribunal judiciaire en cas d’action visant à prononcer la résiliation du bail commercial pour manquement grave du preneur ou du bailleur à ses obligations,
– au cours de négociations pour aboutir à un accord sur la rupture amiable du contrat et dans ce cas, pour la rédaction du protocole de rupture amiable,
– en cas de procédure collective du preneur pour vous assister dans les démarches devant les organes de la procédure ou le juge commissaires et faire valoir vos droits et intérêts suivant que vous êtes bailleur ou preneur.
Maître Nikolay Polintchev, avocat en droit commercial est là pour assister et conseiller les professionnels et les particuliers dans la rédaction et l’analyse de leurs contrats. Il les défend devant les juridictions à l’occasion des contentieux contractuels et des procédures de recouvrement.